Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/511

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Hollandais, qui avaient de nouveau renversé la République et rétabli le stathoudérat, comme au siècle précédent, étaient mis à la raison par la prise de Berg-op-Zoom. Mais il ne nous suffisait pas d’être victorieux aux Pays-Bas. Le théâtre de la guerre était plus vaste. Nous étions battus en Italie, et, comme au seizième siècle, la Provence était envahie par les Impériaux. Frédéric II achevait ce qu’il avait à faire en Allemagne, battait les Saxons, entrait à Dresde, puis, nous trahissant de nouveau, s’arrangeait avec l’Autriche qui lui laissait la Silésie tandis qu’il reconnaissait le nouvel empereur François de Lorraine. Enfin et surtout les Anglais, maîtres de la mer, avaient pu un moment débarquer sur les côtes de Bretagne. La lutte s’était étendue aux colonies et nous nous défendions de notre mieux au Canada et aux Indes où Dupleix édifiait avec de faibles moyens une œuvre grandiose. Qu’arriverait-il donc si la guerre continuait ? Peut-être garderions-nous les Pays-Bas autrichiens. Mais alors aucune paix avec l’Angleterre ne serait possible. Nous perdrions nos colonies. Les hostilités se perpétueraient avec l’Autriche et nous savions désormais qu’il ne fallait pas compter sur Frédéric. Mieux valait liquider tandis que nous tenions des gages. Ainsi cette première guerre de Sept Ans s’acheva par une paix blanche (1748).

Le traité d’Aix-la-Chapelle a passé pour un monument d’absurdité. C’est de lui qu’il devint proverbial de dire : « Bête comme la paix. » Mais, quand le principe de la guerre a été mauvais, comment la paix pourrait-elle être bonne ? Tout ce que nous avions gagné, au dix-huitième siècle, à reprendre contre les Habsbourg la politique qui était opportune au dix-septième, c’était d’avoir agrandi la Prusse et détruit l’équilibre de l’Europe. De la faute commise par la France en 1741, Frédéric fut le bénéficiaire. Déjà, pendant la campagne, il avait été l’arbitre de la situation, nous prêtant son concours autant qu’il y avait intérêt et pas une minute de plus. L’arbitre il le serait encore bien mieux puisqu’il était plus fort qu’avant. Dès ce moment, il était clair que la Prusse aspirait à prendre en Allemagne la place de l’Autriche et que cette ambition n’était plus démesurée. Alors, si la France s’obstinait dans une politique anti-autrichienne, elle travaillait pour Frédéric. Si nous changions de système, si nous renversions nos alliances,