Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/679

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que nous étions payés du service rendu par la cession de Nice et de la Savoie. Enfin, l’unité italienne posait la question romaine et, par la question romaine, la politique intérieure et la politique extérieure de Napoléon III entraient en contradiction. S’il refusait Rome à la nouvelle Italie, il violait le principe des nationalités, il s’aliénait les libéraux français. S’il abandonnait Rome, il soulevait une autre opposition, celle des catholiques français qui, depuis le coup d’État, lui avaient toujours prêté leur appui.

Ce n’étaient même pas les seules conséquences que la politique des nationalités devait produire après un succès éphémère. « L’écueil italien », que lui avait prédit Metternich, obligea d’abord Napoléon III à transformer son système, de gouvernement. C’est à l’intérieur qu’il voulut apaiser les libéraux, en inaugurant l’ « Empire libéral » par la réforme de 1860 qui accroissait les pouvoirs du Corps législatif, lui rendait la parole et acheminait au régime parlementaire. Aux conservateurs, il promettait cette fois la paix, la fin des interventions de principe en Europe, le maintien de la souveraineté du Pape. Mais il n’avait pas réussi à « unir les partis sous un manteau de gloire ». Il n’avait pu satisfaire à la fois « les réactionnaires et les révolutionnaires ». Il avait mécontenté les deux camps en se flattant de résoudre les difficultés auxquelles avaient succombé les régimes précédents. Et il avait préparé à l’extérieur, en reprenant la politique de la Révolution, les périls dont la France allait être assaillie.

Les dix dernières années du second Empire se consumèrent en vains efforts pour rétablir une situation compromise. Depuis le congrès de Paris, Napoléon III voyait s’envoler l’espoir de réviser les traités de 1815. Il déclarait bien que ces traités avaient cessé d’exister, mais c’était vrai surtout en ce sens que la Prusse se disposait à en supprimer les parties qui la gênaient, qui la liaient, qui l’empêchaient d’unifier l’Allemagne. L’Angleterre, alarmée par la réunion de la Savoie et de Nice, soupçonnait la France napoléonienne de préparer d’autres conquêtes. D’autre part, le principe des nationalités, auquel l’empereur restait fidèle, et qu’il n’aurait pu abandonner sans soulever contre lui l’opinion libérale, l’introduisait dans de nouveaux embarras ajoutés à ceux qu’il