Page:Bainville - Histoire de deux peuples.djvu/102

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l’Assemblée. Cette prédilection pour la Prusse, l’entretien de relations constantes avec elle contribuent à expliquer la brusque retraite prussienne après la canonnade de Valmy.

« Revenir aux grandes traditions françaises fut le rêve de son cœur de Français », a-t-on dit de Dumouriez. Ces traditions, c’était la haine de l’Autriche et le culte de la Prusse. Et cette idée fixe d’un retour au passé, d’une restauration de l’ancienne politique, devait pousser logiquement aux suprêmes conséquences révolutionnaires. La tête de ce roi qui ne veut pas revenir aux « grandes traditions » sera tranchée. L’accusation de haute trahison ne tardera pas à être lancée contre lui. Déjà, les hommes qui méditent la République aperçoivent dans la résistance de Louis XVI à la guerre le moyen de faire naître l’occasion où la royauté succombera.

Du jour où fut lancée l’idée, aussitôt populaire, d’une guerre contre la maison d’Autriche, tout soupçon de fidélité à l’ancienne alliance devint mortel. Louis XVI, aidé du ministre des Affaires étrangères Lessart, s’opposait de toutes ses forces à cette aventure. Bienfaisante opposition : c’est elle qui a sauvé la France en retardant les hostilités jusqu’au jour où elle eut des troupes à peu près constituées à mettre en ligne. « Devant une armée désorganisée sous le régime de Duportail, les coalisés, au lieu d’être arrêtés à Valmy, eussent pris la route de Paris, et la France n’eût revu la paix qu’humiliée, démembrée… » « Et encore enchaînée », ajoute l’historien, de l’école de M. Aulard, et ardent pour la Révolution, à qui sont dues ces lignes. Ainsi il n’eût tenu qu’à Louis XVI (s’il eût, comme on l’en a accusé, voulu acheter l’écrasement du mouvement révolutionnaire au prix de la défaite de la France), de précipiter la guerre selon les vœux de la Législative, au lieu de la retarder.

Le jour où Lessart fut décrété d’accusation et envoyé en haute cour pour ce qu’on appelait sa faiblesse à l’égard de l’Autriche, ce jour-là marqua le commencement de la Terreur. Lessart devait être massacré dans les journées de septembre. S’attirer la