Page:Bainville - Histoire de deux peuples.djvu/123

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de cette récompense pour travailler au bien public. Jamais un mot d’amertume n’a échappé aux Bourbons. Charles X, ce roi diffamé, et dont M. Émile Ollivier a pu dire qu’il était « passionné pour le relèvement national », reprit le chemin de l’exil sans avoir manifesté l’ombre de la douleur étonnée qu’exprimait Villèle lorsqu’il constatait que la Restauration avait rendu à la France son rang en Europe, l’ordre, le repos, la prospérité, et que la France ne semblait pas apprécier ces bienfaits.

Nous aussi, nous sommes portés à nous étonner, à distance, que la France, après Waterloo, ne fût pas lassée par de longues années de guerres et de conquêtes inutiles. On peut dire qu’à aucun moment elle n’a senti le prix de la tranquillité que la Restauration lui rendait sans rien lui faire perdre en durables profits ni en gloire militaire. Trocadéro, Navarin, Alger pouvaient satisfaire un peuple, même rendu difficile en fait d’exploits guerriers. C’eût été compter sans la politique des partis, régulièrement installée dès lors. La France ne fut pas plus tôt sortie de la liquidation de l’Empire, que les partis s’emparèrent de la politique étrangère comme de l’arme la plus efficace et la plus meurtrière dans la lutte de tous les jours. Les relations de l’État avec l’extérieur devenant une occasion de guerre civile, un prétexte d’opposition ou de surenchère, c’était la patrie elle-même avec ses intérêts, sa sécurité, ravalée au rang d’enjeu de la bataille électorale et parlementaire. On vit cela dès la Restauration. C’est sur ce domaine réservé, sacré, de la politique extérieure que la campagne la plus vive fut menée contre Louis XVIII et Charles X. Et pourquoi ce choix ? C’est que les partis d’opposition se sentaient appuyés par le sentiment patriotique induit en erreur, trompé sur lui-même par les souvenirs révolutionnaires et napoléoniens. Flatter ce qu’on a nommé « la manie de la gloire et de la conquête » fut l’entreprise à laquelle se voua l’opposition, sur le thème de la France humiliée par les traités de 1815 et mise à la remorque des puissances absolutistes, de la monarchie payant à l’étranger (selon une