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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

l’élément fédérateur sera la nationalité, non pas forcément la plus nombreuse, mais la plus robuste et la plus douée d’esprit militaire. Deux seulement, la Yougo-Slavie et la Hongrie sont dans ce cas. Et il semble que la seconde, malgré son désastre, réunisse des conditions qui manquent à l’autre. Les Hongrois ont un sens national vigoureux, une volonté âpre. Ils offrent, sur les voisins qui se sont agrandis à leurs dépens, l’avantage, moins paradoxal qu’il n’en a l’air, de n’avoir pas à assimiler des populations nouvelles. Leur unité est pure. Ils peuvent inquiéter les quatre États petits ou moyens qui les encerclent, mais aucune grande puissance n’a de raison directe et personnelle de s’opposer à leur relèvement et à leurs pro­grès. Au contraire, le royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes, même s’il était d’un acier assez bien trempé pour conduire à l’extérieur des desseins d’une certaine envergure, serait aussitôt en butte à l’hostilité de l’Italie qui se hâterait de monter contre lui toutes les coalitions possibles. En outre, autant que l’on peut apprécier des chances aussi incertaines, la Hongrie a pour elle d’être entrée des premières dans le courant de cette réaction européenne qui, si elle doit définitivement l’emporter, ne l’emportera pas sans quelques nouvelles luttes. Que le courant contre-révolu­tionnaire grossisse ou que la révolution ait des retours offensifs, qu’une Europe blanche se heurte à une Europe rouge, la Hongrie, telle