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Page:Bainville Les conséquences politiques de la paix 1920.djvu/18

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CONSÉQUENCES POLITIQUES DE LA PAIX

au lieu d’observer les progrès de la Prusse, l’épicier eût observé avec inquiétude les agran­dissements de Félix Potin. « L’abrégé de tous les préceptes consiste au bon sens », disait Louis XIV qui en avait beaucoup. Il y a ainsi des choses que tout le monde peut annoncer avec un peu d’expérience. Il ne fallait pas être extrêmement perspicace pour découvrir que ces quelques mots : « et l’Allemagne d’autre part, » étaient dans le traité de Versailles comme le ver dans le fruit. Quand les délégués de l’Empire allemand signaient ce traité dans la même Galerie des Glaces où l’unité allemande avait été proclamé une première fois un demi­-siècle plus tôt, n’importe quel homme d’instruction moyenne pouvait déjà conclure que ce serait miracle si leurs engagements étaient tenus. Ce qu’on ne peut pas annoncer, par exemple, c’est quand les événements les plus nécessaires se produiront et comment ils se présenteront. Di Rudini, qui était entré fort jeune dans la politique et qui avait vécu fort vieux, avait coutume de répéter : « Évitez de dire : c’est grave. J’ai entendu dire trop souvent que c’était grave. Et surtout ne donnez jamais de dates ».

Il y a un certain degré de complexité qui dépasse le raisonnement. On ne contestera pas que ce degré est atteint par l’Europe telle qu’elle est sortie de la guerre et des cinq traités de Versailles, de Saint-Germain, de Neuilly, de Trianon et de Sèvres. Bien peu de personnes