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qui, par la pauvreté, l’alcoolisme, la misère sexuelle, le manque de perspectives, créent les conditions de la délinquance. Et c’est là qu’il faut imaginer des solutions. La colère des rebelles contre le mépris est la nôtre, mais nous ne pouvons supporter qu’elle soit dirigée ni par la police ni par les caïds qui les enrôlent dans la délinquance comme d’autres dans l’infanterie de marine.

Des esprits pratiques nous assurent que si les prisons n’existaient plus, les bandits grands et petits qu’on arrêterait risqueraient fort de se faire étriper par les gens honnêtes. Nous voulons bien le croire.

Certains, comme Herman Bianchi aux Pays-Bas, ont proposé de recréer pour eux, le temps que s’apaisent les colères, des lieux d’asile. Après la condamnation des Templiers par Philippe le Bel, les bâtiments du Temple furent donnés à l’ordre hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem en 1312. Or les personnes recherchées pour crimes et délits y obtinrent aussitôt droit d’asile. De ce refuge, seule une décision royale d’extradition pouvait les déloger. Ce droit d’asile a été confirmé de siècle en siècle jusqu’à la Révolution par des bulles pontificales. Le remettre en honneur en attendant la commission de médiation ou de réconciliation devrait décourager le justicier qui niche en tout défenseur des vertus.

On peut très bien « oublier » qu’un homme a été un meurtrier ou pire. La Légion étrangère n’a-t-elle pas toujours bénéficié d’une certaine sympathie de la part des Français (en particulier de ceux qui insistent le plus sur leur besoin de sécurité) ? Ces hommes de sac et de corde se sont-ils concilié les cœurs parce qu’ils se seraient repentis ? Rien n’est moins sûr. Mais ils n’apparaissent pas comme dangereux, du moins dans la vie civile, parce que les circonstances des drames qu’ils ont vécus ont changé. Sans uniforme c’est vrai aussi.

La prison nous met en danger, elle crée toutes les conditions d’un constant désastre parce qu’elle jette dehors des gens à qui on a fait subir d’inadmissibles violences pour les punir. Le châtiment