Page:Bakounine - Œuvres t2.djvu/163

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Je pense qu’à cette heure, en France, il n’y a que deux classes qui soient capables de ce mouvement suprême qu’exige le salut de la patrie : ce sont les ouvriers et les paysans.


Ne vous étonnez pas que je parle des paysans. Les paysans ne pèchent que par ignorance, non par manque de tempérament. N’ayant pas abusé ni même usé de la vie, n’ayant pas subi l’action délétère de la civilisation bourgeoise, qui n’a pu que les effleurer à peine à la surface, ils ont conservé tout le tempérament énergique, toute la nature du peuple. La propriété, l’amour et la jouissance non des plaisirs mais du gain, les ont rendus considérablement égoïstes, c’est vrai, mais n’ont pas diminué leur haine instinctive contre ceux qui jouissent des fruits de la terre sans les produire par le travail de leur bras. D’ailleurs le paysan est foncièrement patriotique, national, parce qu’il a le culte de la terre, une véritable passion pour la terre, et il fera une guerre à mort aux envahisseurs étrangers qui viendront le chasser de son champ.

Mais, pour gagner le paysan, il faudra user à son égard d’une grande prudence[1]. S’il est vrai que le paysan hait l’envahisseur du sol, qu’il hait aussi les beaux Messieurs qui le grugent, il ne hait pas moins, malheureusement, les ouvriers des villes.

  1. Ici, le texte de la brochure va sauter brusquement, après une phrase servant de transition, de la page 38 du manuscrit de Bakounine à la page 42 (l. 1) de ce manuscrit.