Page:Bakounine - Œuvres t3.djvu/82

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ment je les repousserais avec horreur et j’enverrais au diable leurs conseils, leur direction et leur science, certain qu’ils me feraient payer par la perte de ma liberté et de ma dignité les bribes de vérité humaine, enveloppées de beaucoup de mensonges, qu’ils pourraient me donner.

Je m’incline devant l’autorité des hommes spéciaux parce qu’elle m’est imposée par ma propre raison. J’ai conscience de ne pouvoir embrasser dans tous ses détails et ses développements positifs qu’une très petite partie de la science humaine. La plus grande intelligence ne suffirait pas pour embrasser le tout. D’où résulte, pour la science aussi bien que pour l’industrie, la nécessité de la division et de l’association du travail. Je reçois et je donne, telle est la vie humaine. Chacun est autorité dirigeante et chacun est dirigé à son tour. Donc il n’y a point d’autorité fixe et constante, mais un échange continu d’autorité et de subordination |180 mutuelles, passagères et surtout volontaires.

Cette même raison m’interdit donc de reconnaître une autorité fixe, constante et universelle, parce qu’il n’y a point d’homme universel, d’homme qui soit capable d’embrasser dans cette richesse de détails, sans laquelle l’application de la science à la vie n’est point possible, toutes les sciences, toutes les branches de la vie sociale. Et, si une telle universalité pouvait jamais se trouver réalisée dans un seul homme, et qu’il voulût s’en prévaloir pour nous imposer son autorité, il faudrait chasser cet homme de