Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/171

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semble que quand ce grand soleil de la France s’éteindra, il y aura éclipse partout, et que toutes les lanternes plus ou moins bigarrées qu’allumeront les savants raisonneurs de l’Allemagne ne sauront compenser cette grande et simple clarté que versait sur le monde l’esprit de la France. Enfin, je suis convaincu que l’asservissement de la France et le triomphe définitif de l’Allemagne, assujettie aux Prussiens, feront retomber toute l’Europe dans les ténèbres, dans la misère et dans l’esclavage des siècles passés. J’en suis tellement convaincu, que je pense que c’est aujourd’hui un devoir sacré pour tout homme qui aime la liberté, et qui veut |62 le triomphe de l’humanité sur la brutalité, qui veut l’émancipation de son propre pays, de venir, quel que soit d’ailleurs son pays, qu’il soit Anglais, Espagnol, Italien, Polonais, Russe, même Allemand, prendre part à cette lutte démocratique du peuple français contre l’invasion du despotisme germanique. Si tels sont les sentiments d’un étranger, quels doivent être ceux qui animent les patriotes sincères de la France ! Ne devrait-on pas supposer que le danger de honte et de mort qui menace leur patrie a dû secouer tout leur être, agrandir leur nature, élargir leur esprit, abattre tous les étroits préjugés de profession, de position et de classe qui avaient obstrué leur pensée jusque-là, allumer enfin dans leurs cœurs ressuscités la puissance des résolutions suprêmes, les transformer en révolutionnaires, en un mot ?