Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/194

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par trop généreuse, ces bons bourgeois se mettraient dans un tel état de colère que, pour ne plus entendre répéter de pareilles choses, ils seraient capables de se livrer, avec leur patrie, aux Prussiens.

Telle est en effet, aujourd’hui, la vraie mesure du patriotisme et du républicanisme de ces frères aînés de la civilisation, les bourgeois. Il faut donc être vraiment doué ou d’une grande capacité d’illusion ou d’un grand esprit de mensonge, il faut être sophiste ou aveugle, pour chercher les fondements de la nouvelle République, ou, pour me servir des propres expressions de M. Gambetta, « de la République à la fois rationnelle et positiviste », dans la conscience et dans l’action gouvernementale de la bourgeoisie actuelle. M. Rochefort n’est point tombé dans cette faute, ou plutôt il a dédaigné de se servir d’un mensonge si grossier, et c’est précisément en ceci que consista, aux yeux de tous les démocrates sincères, son mérite. Mais ce fut aussi la cause principale |82 de l’animosité de tous les républicains bourgeois contre lui.

Dès le premier jour de sa rentrée à Paris, M. Rochefort s’était mis résolument au milieu du peuple, et il en épousa les intérêts, les aspirations et les droits avec une passion qui parut sincère à tout le monde. Était-il socialiste ? Je pense qu’il eût été fort embarrassé lui-même de répondre à cette question. On prétend même qu’il aurait avoué un jour qu’il n’entendait absolument rien au socialisme, mais qu’il se sentait toute la bonne volonté néces-