Page:Bakounine - Œuvres t4.djvu/303

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geois. Pourtant, on pourrait considérer comme non-bourgeois et comme appartenant au prolétariat cette masse de travailleurs de la science et des arts qui parviennent à peine à gagner leur vie et qui s’écrasent mutuellement dans une concurrence effroyable ; leur existence est souvent plus précaire et plus misérable que celle des ouvriers proprement dits. De fait, ils ne sont rien que des prolétaires ; pour le devenir complètement, il ne leur manque qu’une chose, c’est de le devenir de volonté, de sentiment et d’idée. Mais c’est là ce qui précisément les sépare du prolétariat. Ils sont en très grande partie des bourgeois par leurs préjugés, par leurs aspirations et leurs espérances toujours illusoires, et par leur vanité surtout. Il en est de même de cette masse encore plus nombreuse de petits industriels et de petits commerçants qui, ne voulant pas voir et se refusant à comprendre que le concours des forces économiques actuelles les pousse fatalement dans le prolétariat, s’imaginent follement qu’ils sont solidaires des |5 intérêts de la haute bourgeoisie.

Tout ce monde bourgeois, à cette heure, est intellectuellement impuissant et moralement pourri. Il a renié tous ses dieux, n’a plus foi en rien ni en lui-même, et ne vit plus que d’hypocrisie et de violence. De toutes les religions qu’il avait professées et dont il trouve bon de faire apparence encore aujourd’hui, il n’en a plus conservé qu’une sérieuse : celle de la propriété de la richesse acquise, toujours augmentée