Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/119

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tral de la Ligue, on croit entendre des moribonds qui s’efforcent de réveiller des morts. Pas une pensée vivante, rien que la répétition de phrases rebattues et l’expression impuissante de vœux aussi vertueux que stériles, et que l’histoire a depuis longtemps condamnés, à cause même de leur désolante impuissance.

Et pourtant, il faut rendre cette justice à la Ligue de la paix et de la liberté qu’elle réunit dans son sein les bourgeois les plus avancés, les plus intelligents, les mieux pensants et les plus généreusement disposés de l’Europe ; bien entendu à l’exception d’un petit groupe d’hommes qui, quoique nés et élevés dans la classe bourgeoise, du moment qu’ils ont compris que la vie s’était retirée de cette classe respectable, qu’elle n’avait plus aucune raison d’être et qu’elle ne pouvait continuer d’exister qu’au détriment de la justice et de l’humanité, ont brisé toute relation avec elle et, lui tournant le dos, se sont mis résolument au service de la grande cause de l’émancipation des travailleurs exploités et dominés aujourd’hui par cette même bourgeoisie.

Comment se fait-il donc que cette Ligue, qui compte tant d’individus intelligents, savants et sincèrement libéraux dans son sein, manifeste aujourd’hui une si grande pauvreté de pensée et une incapacité si évidente de vouloir, d’agir et de vivre ?

Cette incapacité et cette pauvreté ne tiennent pas aux individus, mais à la classe tout entière à laquelle ces individus ont le malheur d’appartenir.

Cette classe, la bourgeoisie, comme corps poli-