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Page:Bakounine - Œuvres t5.djvu/143

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vaises choses ne peuvent s’y établir qu’à l’aide d’une apparence respectable. De là est né le proverbe qui dit que l’hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu. Les brutalités les plus puissantes ont besoin d’une sanction.

Nous avons vu que la noblesse avait mis toutes les siennes sous la protection de la grâce divine. La bourgeoisie ne pouvait recourir à cette protection. D’abord parce que le bon Dieu et sa représentante l’Église s’étaient trop compromis en protégeant exclusivement, pendant des siècles, la monarchie et l’aristocratie nobiliaire, — cette ennemie mortelle de la bourgeoisie ; et ensuite parce que la bourgeoisie, quoi qu’elle dise et quoi qu’elle fasse, dans le fond de son cœur est athée. Elle parle du bon Dieu pour le peuple, mais elle n’en a pas besoin pour elle-même, et ce n’est jamais dans les temples dédiés au Seigneur, c’est dans ceux qui sont dédiés à Mammon, c’est à la Bourse, dans les comptoirs de commerce et de banque et dans les grands établissements industriels, qu’elle fait ses affaires. Il lui fallait donc chercher une sanction en dehors de l’Église et de Dieu. Elle l’a trouvée dans l’intelligence patentée.

Elle sait fort bien que la base principale, et on pourrait dire unique, de sa puissance politique actuelle, c’est sa richesse ; mais, ne voulant ni ne pouvant l’avouer, elle cherche à expliquer cette puissance par la supériorité de son intelligence, non naturelle mais scientifique ; pour gouverner les