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REINE D’ARBIEUX

révoltes d’un amour qu’elle n’avait pas su apaiser ?

Un jour, elle avait été sur le point de ren­trer chez elle. Pourquoi pas ? Sa nature inclinait toujours aux décisions rapides et courageuses ; égarée par sa douleur, par ses idées fixes, elle eût été capable de tout perdre ! Clémence l’avait détournée de cette folie. Elle avait cédé, n’y pensait plus, ne voyait désormais aucune issue.

« Pourtant, pensait-elle, je suis sa femme ! » Le sentiment de son devoir, d’un droit qu’elle n’avait pas mérité de perdre, demeurait en elle comme une attache qui ne pouvait se rompre. Si elle était partie, c’était dans un moment de folie et de déses­poir. La douleur d’être accusée lui avait paru into­lérable. Elle s’était enfuie.

À l’église seulement, quand elle revivait ces jours tumultueux, un peu de douceur la pénétrait. Si coupable qu’elle fût, elle ne l’était pas autant qu’il pouvait le croire. Le dimanche, elle fuyait l’office chanté, par crainte de rencontrer sa tante et d’être exposée aux regards de toute la paroisse ; mais elle avait pris l’habitude de se lever avant le jour pour accompagner Clémence à la messe basse. Elle s’agenouillait derrière un pilier. Du fond de son enfance, une foi ardente remontait en elle, la rem­plissait de ferveur et d’humilité. Tout ce qu’elle souffrait, elle savait l’avoir mérité. Qui donc aurait pu lui reprocher son aveuglement et ses impru­dences plus sévèrement qu’elle ne le faisait ? Mais qu’elle était punie !