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REINE D’ARBIEUX

fidélité lui devait-elle, alors qu’il n’avait rien promis ni rien demandé ?… Il s’était tu. Il était parti. À l’instant où il aurait fallu un acte de foi devant la vie, qu’avait-il trouvé en lui-même, sinon d’inutiles scrupules et l’indécision !

« Ah ! pensait-il, se rappelant la tristesse diffuse à son foyer, et cette impression de découragement, de timidité, qui avait en secret marqué son âme, il aurait fallu croire que toutes ces belles choses étaient possibles ! »

Ce soir-là, Régis fut longtemps avant de s’endormir. Ivre de sa tristesse, comme d’un alcool qui fait flamber les pensées et les souvenirs, il sentait que le temps ne pourrait effacer ce regret de sa vie manquée. Dans ses rêves, le visage de Reine reparaissait, ce visage rayonnant de beauté, de douceur vivante. « Ne me laissez pas, » disaient ses grands yeux brillants. Est-ce que cet instant avait pu passer ? Était-il possible qu’elle eût aimé ailleurs ? Aimé pour toujours ? Oui, c’était vrai — et il s’agitait dans son sommeil — il ne pouvait plus rien sur elle, il l’avait perdue.

Quelques jours après son arrivée, Régis chercha dans la remise sa bicyclette qui n’avait pas servi depuis quatre ans. Avec son guidon couvert de rouille, d’une ancienne forme, et son cadre où le vernis s’était écaillé, elle paraissait bonne pour la ferraille. Il la nettoya, gonfla les pneus, et partit à la fin de l’après-midi pour La Renardière.

Le temps n’avait pas changé grand’chose au