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REINE D’ARBIEUX

pas fait pour arracher à la vie un butin quelconque, elle s’était inquiétée de ses longs silences. Alors même qu’il ne répondait pas, elle lui écrivait. Clairvoyante, elle était pourtant dupe de ses souvenirs. C’était maintenant qu’elle comprenait tout.

Mme de la Brèche était souffrante. Ils s’assirent seuls sous les arbres. Mais, entre eux, sans qu’ils eussent encore parlé d’elle, Reine était présente. Mélancolique, Régis attendait l’instant où son nom serait prononcé. Comme un malade jouit de la piqûre calmante qui engourdit sa douleur et l’emplit de rêve, il savourait le charme du souvenir.

— Est-ce qu’elle est heureuse ? demanda-t-il, lorsque Clémence eut rompu la première le précieux silence.

Elle réfléchissait.

— Elle ne l’a pas toujours été — et Régis eut l’impression que la jeune fille pesait dans son cœur chacune de ses paroles — elle avait une âme trop riche. Elle voulait donner beaucoup. Elle attendait trop. Mais Germain l’aimait…

Il y eut un silence.

— Il est rare, continua Clémence, qu’on soit préparé à ce qui arrive : pour les uns — et une expression de tristesse voila son regard — les infirmités ; pour les autres, les déceptions, les échecs du cœur. Les choses ne sont jamais exactement ce qu’on espérait. Peut-être finissent-elles par être plus belles…