eut de ces allucinations qui restituent un instant la forme et l’existence à des personnes dont on pleure la mort, ou qui rendent présentes celles dont on regrette l’absence. Il voyait, il entendait les héros de tous les âges, soit ceux dont les noms sont consacrés par l’histoire, soit ceux qui n’eurent de réalité que dans le roman ou la poésie. Les sons d’une cloche lointaine le transportaient vivement au milieu des scènes les plus intimes de la vie, tantôt pour lui faire éprouver la douce émotion d’un gracieux épithalame qui promettrait d’heureuses destinées à de jeunes époux, tantôt pour le faire frémir comme s’il eût entendu le glas funèbre d’un vieillard rassasié de jours. Les météores de l’air avaient mille choses à lui raconter des contrées les plus éloignées. Tous les êtres, tous les objets avaient une voix. Ce quelque chose, qu’on dirait l’ame de la création, s’entretenait avec son ame. Il croyait avoir voyagé, sans l’intermédiaire de ses sens, dans les régions de
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