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rentrer au salon, faites-lui bien comprendre qu’il a mal interprété ma façon de le recevoir ; que, naturellement, ce soir-là, j’étais sous le coup d’une grande préoccupation.

— Soyez tranquille, ajouta Franchessini, je lui parlerai comme il faut, parce que, je le répète, c’est un homme à ne pas pousser à bout ; il y a dans la vie d’anciennes rencontres qu’on ne peut empêcher d’avoir été.

Le ministre n’ayant rien répondu à cette remarque, n’était-ce pas assez dire qu’il n’en méconnaissait pas la valeur ?

— Vous serez ici pour la séance royale ? Il nous faut un peu d’enthousiasme, dit Rastignac au colonel.

Celui-ci, avant de sortir, demanda à madame de Rastignac quel jour il pourrait avoir l’honneur de lui présenter sa femme.

— Mais tous les jours, répondit Augusta, et plus particulièrement le vendredi.


CHAPITRE XXIII

CONCERT ET FUGUE


À l’heure où Rastignac, suivant l’indication de sa femme, se croyait assuré de trouver madame de l’Estorade, il ne manqua pas de se présenter chez elle.

Comme tous les gens qui avaient assisté à la scène provoquée par le paradoxe de monsieur de Ronquerolles, le ministre avait été frappé de l’émotion témoignée par la comtesse, et, sans se préoccuper de la nature et de la profondeur du sentiment qu’elle pouvait éprouver pour le sauveur de sa fille, il était, du moins, resté convaincu qu’elle lui portait un vif intérêt.

Par l’imprévu et le tour de force de sa nomination, Sallenauve préoccupait d’autant plus vivement le ministère, que d’abord sa candidature avait été moins prise au sérieux.