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Page:Balzac- Traité de la vie élégante - 1922.djvu/183

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DE LA DÉMARCHE

D’autres paraissent n’avancer qu’à force de bras ; leurs mains sont des rames dont ils s’aident pour naviguer : ce sont les galériens de la démarche.

Il y a des niais qui écartent trop leurs jambes, et sont tout surpris de voir passer sous eux les chiens courant après leurs maîtres. Selon Pluvinel, les gens ainsi conformés font d’excellents cavaliers.

Quelques personnes marchent en faisant rouler, à la manière d’Arlequin, leur tête, comme si elle ne tenait pas. Puis il y a des hommes qui fondent comme des tourbillons ; ils font du vent, ils paraphrasent la Bible ; il semble que l’esprit du Seigneur vous ait passé devant la face si vous rencontrez ces sortes de gens. Ils vont comme tombe le couteau de l’exécuteur. Certains marcheurs lèvent une jambe précipitamment et l’autre avec calme : rien n’est plus original. D’élégants promeneurs font une parenthèse en appuyant le poing sur la hanche, et accrochent tout avec leur coude. Enfin, les uns sont courbés, les autres sont déjetés ; ceux-ci donnent de la tête de côté et d’autre, comme des cerfs-volants indécis ; ceux-là portent le corps en arrière ou en avant. Presque tous se retournent gauchement.

Arrêtons-nous.

Autant d’hommes, autant de démarches !