— Ma foi !… je vous rencontrerais au bal de l’Opéra, tu ne serais pas ma femme, eh bien ! j’hésiterais…
— Tu es gentil aujourd’hui. N’oublie pas de les inviter à dîner pour samedi prochain.
— Ce sera fait ce soir. Foullepointe et moi, nous nous voyons souvent à la Bourse.
— Enfin, se dit Caroline, cette femme me dira sans doute quels sont ses moyens d’action.
Caroline se remet en observation. À trois heures environ, à travers les fleurs d’une jardinière qui fait comme un bocage à la fenêtre, elle regarde et s’écrie : — Deux vrais tourtereaux !…
Pour ce samedi, Caroline invite monsieur et madame Deschars, le digne monsieur Fischtaminel, enfin les plus vertueux ménages de sa société. Tout est sous les armes chez Caroline : elle a commandé le plus délicat dîner, elle a sorti ses splendeurs des armoires ; elle tient à fêter le modèle des femmes.
— Vous allez voir, ma chère, dit-elle à madame Deschars au moment où toutes les femmes se regardent en silence, vous allez voir le plus adorable ménage du monde, nos voisins d’en face : un jeune homme blond d’une grâce infinie, et des manières… une tête à la lord Byron, et un vrai don Juan, mais fidèle ! il est fou de sa femme. La femme est charmante et a trouvé des secrets pour perpétuer l’amour ; aussi peut-être devrai-je un regain de bonheur à cet exemple ; Adolphe, en les voyant, rougira de sa conduite, il…
On annonce : — Monsieur et madame Foullepointe.
Madame Foullepointe, jolie brune, la vraie Parisienne, une femme cambrée, mince, au regard brillant étouffé par de longs cils, mise délicieusement, s’assied sur le canapé. Caroline salue un gros monsieur à cheveux gris assez rares, qui suit cette Andalouse de Paris, et qui montre une figure et un ventre siléniques, un crâne beurre frais, un sourire papelard et libertin sur de bonnes grosses lèvres, un philosophe enfin ! Caroline regarde ce monsieur d’un air étonné.
— Monsieur Foullepointe, ma bonne, dit Adolphe en lui présentant ce digne quinquagénaire.
— Je suis enchantée, madame, dit Caroline en prenant un air aimable, que vous soyez venue avec votre beau-père (profonde sensation) ; mais nous aurons, j’espère, votre mari…