Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1855, tome 19.djvu/186

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QUINOLA.

On ne se doute encore de rien.

MONIPODIO.

Ni eux, ni personne. Chaque pièce est enveloppée comme un bijou, et déposée dans une cave. Mais il faut trente écus.

QUINOLA.

Oh! mon Dieu !

MONIPODIO.

Trente drôles bâtis comme ça boivent et mangent comme soixante.

QUINOLA.

La maison Quinola et compagnie a fait faillite, et l’on est à mes trousses.

MONIPODIO.

Des protêts ?

QUINOLA.

Es-tu bête ? de bonnes prises de corps. Mais j’ai pris chez un fripier deux ou trois défroques qui vont me permettre de soustraire Quinola aux recherches des plus fins limiers, jusqu’au moment où je pourrai payer.

MONIPODIO.

Payer ?… c’te bêtise !

QUINOLA.

Oui j’ai gardé un trésor pour la soif. Reprends ta souquenille de Frère quêteur, et va chez Lothundiaz parlementer avec la duègne.

MONIPODIO.

Hélas ! Lopez est tant de fois retourné d’Alger, que notre duègne commence à en revenir.

QUINOLA.

Bah ! il ne s’agit que de faire parvenir cette lettre à la sénorita Marie Lothundiaz. (Il lui donne une lettre.) C’est un chef-d’œuvre d’éloquence inspiré par ce qui inspire tous les chefs-d’œuvre, vois : nous sommes depuis dix jours au pain et à l’eau.

MONIPODIO.

Et nous donc ? crois-tu que nous mangions des ortolans ? Si nos hommes croyaient bien faire, ils auraient déjà déserté.

QUINOLA.

Veuille l’amour acquitter ma lettre de change, et nous nous en tirerons encore… (Monipodio sort.)