Mon père et le vôtre sont amis ; ils consentent à notre mariage, nous nous aimons comme s’ils s’y opposaient, et vous voilà rêveur, presque triste !
Vous avez votre raison, et moi, je n’ai plus la mienne. Au moment où vous ne voyez plus d’obstacle, il peut en surgir d’insurmontables.
Raoul, quelles inquiétudes jetez-vous dans notre bonheur !
Notre bonheur ! (À part.) Il m’est impossible de feindre. (Haut.) Au nom de notre amour, je vous demande de croire en ma loyauté.
Ma confiance en vous n’était-elle pas infinie ? Et le général a tout justifié, jusqu’à votre silence chez les Montsorel. Aussi vous pardonné-je les petits chagrins que vous étiez obligé de me causer.
Ah ! Vautrin ! je me livre à toi ! (Haut.) Inès, vous ne savez pas quelle est la puissance de vos paroles : elles m’ont donné la force de supporter le ravissement que vous me causez. Eh bien ! oui, soyons heureux !
Scène VIII.
M. le marquis de Montsorel.
Ah ! ce nom me rappelle à moi-même. (À Inès.) Quoi qu’il arrive, Inès, attendez pour juger ma conduite l’heure où je vous la soumettrai moi-même, et pensez que j’obéis en ce moment à une invincible fatalité.
Raoul, je ne vous comprends plus mais je me fie toujours à vous.
Encore ce petit monsieur ! (Il salue Inès.) Je vous croyais avec votre mère, Mademoiselle, et j’étais loin de penser que ma visite pût être importune. Faites-moi la grâce de m’excuser…