Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 11.djvu/46

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la commandite en disant à l’Actionnaire qu’on avait la bonté de ne pas lui demander plus de mille, de cinq cents, ou même de deux cent cinquante francs ! On ne publiait pas que l’expérience in ære publico ne durerait que sept ans, cinq ans, ou même trois ans, et qu’ainsi le dénoûment ne se ferait pas long-temps attendre. C’était l’enfance de l’art ! On n’avait même pas fait intervenir la publicité de ces gigantesques annonces par lesquelles on stimule les imaginations, en demandant de l’argent à tout monde…

— Cela arrive quand personne n’en veut donner, dit Couture.

— Enfin la concurrence dans ces sortes d’entreprises n’existait pas, reprit Bixiou. Les fabricants de papier mâché, d’impressions sur indiennes, les lamineurs de zinc, les Théâtres, les Journaux ne se ruaient pas comme des chiens à la curée de l’actionnaire expirant. Les belles affaires par actions, comme dit Couture, si naïvement publiées, appuyées par des rapports de gens experts (les princes de la science !…) se traitaient honteusement dans le silence et dans l’ombre de la Bourse. Les Loups-Cerviers exécutaient, financièrement parlant, l’air de la calomnie du Barbier de Séville. Ils allaient piano, piano, procédant par de légers cancans, sur la bonté de l’affaire, dits d’oreille à oreille. Ils n’exploitaient le patient, l’actionnaire, qu’à domicile, à la Bourse, ou dans le monde, par cette rumeur habilement créée et qui grandissait jusqu’au tutti d’une Cote à quatre chiffres…

— Mais, quoique nous soyons entre nous et que nous puissions tout dire, je reviens là-dessus, dit Couture.

— Vous êtes orfèvre, monsieur Josse ? dit Finot.

— Finot restera classique, constitutionnel et perruque, dit Blondet.

— Oui, je suis orfèvre, reprit Couture pour le compte de qui Cérizet venait d’être condamné en Police Correctionnelle. Je soutiens que la nouvelle méthode est infiniment moins traîtresse, plus loyale, moins assassine que l’ancienne. La publicité permet la réflexion et l’examen. Si quelque actionnaire est gobé, il est venu de propos délibéré, on ne lui a pas vendu chat en poche. L’Industrie…

— Allons, voilà l’Industrie ! s’écria Bixiou.

— L’Industrie y gagne, dit Couture sans prendre garde à l’interruption. Tout Gouvernement qui se mêle du Commerce et ne le laisse pas libre, entreprend une coûteuse sottise : il arrive ou au