Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 12.djvu/18

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suffisamment déshonorés par un arrêt de Cour d’assises, seraient punis au delà des bornes, s’ils subissaient leur peine à Melun ou à Poissy. Ouvrard préféra le séjour de la Conciergerie à celui de Sainte-Pélagie. En ce moment, le notaire Lehon, le prince de Bergues y font leur temps de détention par une tolérance arbitraire, mais pleine d’humanité.

Généralement les prévenus, soit pour aller, en argot de palais, à l’instruction, soit pour comparaître en police correctionnelle, sont versés par les paniers à salade directement à la Souricière. La Souricière, qui fait face au guichet, se compose d’une certaine quantité de cellules pratiquées dans les cuisines de saint Louis, et où les prévenus extraits de leurs prisons attendent l’heure de la séance du tribunal ou l’arrivée de leur juge d’instruction. La Souricière est bornée au nord par le quai, à l’est par le corps-de-garde de la garde municipale, à l’ouest par la cour de la Conciergerie, et au midi par une immense salle voûtée (sans doute l’ancienne salle des festins), encore sans destination. Au-dessus de la Souricière s’étend un corps-de-garde intérieur, ayant vue par une croisée sur la cour de la Conciergerie, il est occupé par la gendarmerie départementale et l’escalier y aboutit. Quand l’heure du jugement sonne, les huissiers viennent faire l’appel des prévenus, les gendarmes descendent en nombre égal à celui des prévenus, chaque gendarme prend un prévenu sous le bras ; et, ainsi accouplés, ils gravissent l’escalier, traversent le corps-de-garde et arrivent par des couloirs dans une pièce contiguë à la salle où siège la fameuse Sixième Chambre du tribunal, à laquelle est dévolue l’audience de la police correctionnelle. Ce chemin est celui que prennent aussi les accusés pour aller de la Conciergerie à l’audience, et pour en revenir.

Dans la salle des Pas-Perdus, entre la porte de la Première Chambre du Tribunal de première instance et le perron qui mène à la Sixième, on remarque immédiatement, en s’y promenant pour la première fois, une entrée sans porte, sans aucune décoration d’architecture, un trou carré vraiment ignoble. C’est par là que les juges, les avocats, pénètrent dans ces couloirs, dans le corps-de-garde, descendent à la Souricière et au Guichet de la Conciergerie. Tous les cabinets des juges d’instruction sont situés à différents étages dans cette partie du Palais. On y parvient par d’affreux escaliers, un dédale où se perdent presque toujours ceux à qui le