Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 14.djvu/425

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« À demain, dit Pierquin.

— Venez déjeuner », dit Balthazar. Puis Claës parut rassembler ses souvenirs et s’écria : « Mais d’après mon contrat de mariage qui a été fait sous la coutume de Hainaut, j’avais dispensé ma femme de l’inventaire afin qu’on ne la tourmentât point, je n’y suis probablement pas tenu non plus…

— Ah ! quel bonheur, dit Marguerite, il nous aurait causé tant de peine.

— Eh bien, nous examinerons votre contrat demain, répondit le notaire un peu confus.

— Vous ne le connaissiez donc pas ? » lui dit Marguerite.

Cette observation interrompit l’entretien. Le notaire se trouva trop embarrassé de continuer après l’observation de sa cousine.

« Le diable s’en mêle ! se dit-il dans la cour. Cet homme si distrait retrouve la mémoire juste au moment où il le faut pour empêcher de prendre des précautions contre lui. Ses enfants seront dépouillés ! c’est aussi sûr que deux et deux font quatre. Parlez donc affaires à des filles de dix-neuf ans qui font du sentiment. Je me suis creusé la tête pour sauver le bien de ces enfants-là, en procédant régulièrement et en m’entendant avec le bonhomme Conyncks. Et voilà ! Je me perds dans l’esprit de Marguerite qui va demander à son père pourquoi je voulais procéder à un inventaire qu’elle croit inutile. Et M. Claës lui dira que les notaires ont la manie de faire des actes, que nous sommes notaires avant d’être parents, cousins ou amis, enfin des bêtises… » Il ferma la porte avec violence en pestant contre les clients qui se ruinaient par sensibilité. Balthazar avait raison. L’inventaire n’eut pas lieu. Rien ne fut donc fixé sur la situation dans laquelle se trouvait le père vis-à-vis de ses enfants. Plusieurs mois s’écoulèrent sans que la situation de la Maison Claës changeât. Gabriel, habilement conduit par M. de Solis qui s’était fait son précepteur, travaillait avec application, apprenait les langues étrangères et se disposait à passer l’examen nécessaire pour entrer à l’École polytechnique.

Félicie et Marguerite avaient vécu dans une retraite absolue, en allant, néanmoins, par économie, habiter pendant la belle saison la maison de campagne de leur père. M. Claës s’occupa de ses affaires, paya ses dettes en empruntant une somme considérable sur ses biens et visita la forêt de Waignies. Au milieu