Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 15.djvu/651

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Louvre après une absence de plus d’une année, y tint conseil avec ses intimes sur la conduite à tenir avec le jeune roi, que Cypierre avait complimenté sur sa fermeté.

— Que faire ? dit-elle aux deux Gondi, à Ruggieri, à Birague et à Chiverny devenu gouverneur et chancelier du duc d’Anjou.

— Avant tout, dit Birague, changez Cypierre. Ce n’est pas un homme de cour, il ne s’accommoderait jamais à vos vues et croirait faire sa charge en vous contre-carrant.

— À qui me fier ! s’écria la reine.

— À l’un de nous, dit Birague.

— Par ma foi, reprit Gondi, je vous promets de vous rendre le roi souple comme le roi de Navarre.

— Vous avez laissé périr le feu roi pour sauver vos autres enfants, eh ! bien, faites comme chez les Grands-Seigneurs de Constantinople, annulez les colères et les fantaisies de celui-ci, dit Albert de Gondi. Il aime les arts, les poésies, la chasse, et une petite fille qu’il a vue à Orléans, en voilà bien assez pour l’occuper.

— Vous seriez donc le gouverneur du roi ? dit Catherine au plus capable des deux Gondi.

— Si vous voulez me donner l’autorité nécessaire à un gouverneur, peut-être faudrait-il me nommer maréchal de France et duc. Cypierre est de trop petite taille pour continuer d’avoir cette charge. À l’avenir, le gouverneur d’un roi de France doit être quelque chose comme maréchal et duc…

— Il a raison, dit Birague.

— Poète et chasseur, dit Catherine du ton de la rêverie.

— Nous chasserons et nous aimerons ! s’écria Gondi.

— D’ailleurs, dit Chiverny, vous êtes sûre d’Amyot, qui aura toujours peur du boucon en cas de désobéissance, et avec Gondi vous tiendrez le roi en lisière.

— Vous vous êtes résignée à perdre un enfant pour sauver vos trois fils et la couronne, il faut avoir le courage d’occuper celui-ci pour sauver le royaume, peut-être pour vous sauver vous-même, dit Ruggieri.

— Il vient de m’offenser gravement, dit Catherine de Médicis.

— Il ne sait pas tout ce qu’il vous doit ; et s’il le savait, vous seriez en danger, répondit gravement Birague en appuyant sur ses paroles.

— C’est entendu, reprit Catherine sur qui cette réponse produisit un effet violent, vous serez gouverneur du roi, Gondi. Le roi doit me