Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 16.djvu/12

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le chef de cette Université secrète d’où sortirent les Cardan, les Nostradamus et les Agrippa, qui tour à tour furent médecins des Valois, enfin tous les astronomes, les astrologues, les alchimistes qui entourèrent à cette époque les princes de la chrétienté, et qui furent plus particulièrement accueillis et protégés en France par Catherine de Médicis. Dans le thème de nativité que dressèrent Bazile et Ruggieri-le-Vieux, les principaux événements de la vie de Catherine furent prédits avec une exactitude désespérante pour ceux qui nient les Sciences Occultes. Cet horoscope annonçait les malheurs qui pendant le siége de Florence signalèrent le commencement de sa vie, son mariage avec un fils de France, l’avénement inespéré de ce fils au trône, la naissance de ses enfants, et leur nombre. Trois de ses fils devaient être rois chacun à leur tour, deux filles devaient être reines, et tous devaient mourir sans postérité. Ce thème se réalisa si bien, que beaucoup d’historiens l’ont cru fait après coup.

Chacun sait que Nostradamus produisit au château de Chaumont, où Catherine alla lors de la conspiration de la Renaudie, une femme qui possédait le don de lire dans l’avenir. Or, sous le règne de François II quand la reine voyait ses quatre fils en bas âge et bien portants, avant le mariage d’Élisabeth de Valois avec Philippe II, roi d’Espagne, avant celui de Marguerite de Valois avec Henri de Bourbon, roi de Navarre, Nostradamus et son amie confirmèrent les circonstances du fameux thème. Cette personne, douée sans doute de seconde vue, et qui appartenait à la grande école des infatigables chercheurs du grand œuvre, mais dont la vie secrète a échappé à l’histoire, affirma que le dernier enfant couronné mourrait assassiné. Après avoir placé la reine devant un miroir magique où se réfléchissait un rouet, sur une des pointes duquel se dessina la figure de chaque enfant, la sorcière imprimait un mouvement au rouet et la reine comptait le nombre des tours qu’il faisait. Chaque tour était pour chaque enfant une année de règne. Henri IV mis sur le rouet fit vingt-deux tours. Cette femme (quelques auteurs en font un homme) dit à la reine effrayée que Henri de Bourbon serait en effet roi de France et régnerait tout ce temps. La reine Catherine voua dès lors au Béarnais une haine mortelle en apprenant qu’il succéderait au dernier des Valois assassiné. Curieuse de connaître quel serait le genre de sa mort à elle, il lui fut dit de se défier de Saint-Germain. Dès ce jour, pensant