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Page:Balzac - Œuvres complètes, éd. Houssiaux, 1874, tome 8.djvu/484

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— Doublon et ses hommes, le diable, Kolb se bat avec eux, on va vendre.

— Non, non, l’on ne vendra pas, rassurez-vous ! s’écria Petit-Claud dont la voix retentit dans la pièce qui précédait la chambre à coucher, je viens de signifier un appel. Vous ne devez pas rester sous le poids d’un jugement qui taxe de mauvaise foi. Je ne me suis pas avisé de me défendre ici. Pour vous gagner du temps, j’ai laissé bavarder Cachan, je suis certain de triompher encore une fois à Poitiers…

— Mais combien ce triomphe coûtera-t-il ? demanda madame Séchard.

— Des honoraires si vous triomphez, et mille francs si nous perdons.

— Mon Dieu, s’écria la pauvre Ève, mais le remède n’est-il pas pire que le mal ?…

En entendant ce cri de l’innocence éclairée au feu judiciaire, Petit-Claud resta tout interdit, tant Ève était belle.

Le père Séchard, mandé par Petit-Claud, arriva sur ces entrefaites. La présence du vieillard dans la chambre à coucher de ses enfants, où son petit-fils au berceau souriait au malheur, rendit cette scène complète.

— Papa Séchard, dit le jeune avoué, vous me devez sept cents francs pour votre intervention ; mais vous les répéterez contre votre fils, en les ajoutant à la masse des loyers qui vous sont dus.

Le vieux vigneron saisit la piquante ironie que Petit-Claud mit dans son accent et dans son air en lui adressant cette phrase.

— Il vous en aurait moins coûté pour cautionner votre fils ! lui dit Ève en quittant le berceau pour venir embrasser le vieillard…

David, accablé par la vue de l’attroupement qui s’était fait devant sa maison, où la lutte de Kolb et des gens de Doublon avait attiré du monde, tendit la main à son père sans lui dire bonjour.

— Et comment puis-je vous devoir sept cents francs ? demanda le vieillard à Petit-Claud.

— Mais parce que j’ai, d’abord, occupé pour vous. Comme il s’agit de vos loyers, vous êtes vis-à-vis de moi solidaire avec votre débiteur. Si votre fils ne me paye pas ces frais-là vous me les payerez, vous… Mais, ceci n’est rien, dans quelques heures on voudra mettre David en prison, l’y laisserez-vous aller ?

— Que doit-il ?