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URSULE MIROUET.

en un conciliabule semblable à celui qu’ils y tenaient quinze jours auparavant. Au grand étonnement des groupes, à la sortie de la messe, madame de Portenduère arrêta le vieux Minoret, qui lui offrit le bras et la reconduisit. La vieille dame voulait le prier à dîner, ainsi que sa pupille, aujourd’hui même, en lui disant que monsieur le curé serait l’autre convive.

— Il aura voulu montrer Paris à Ursule, dit Minoret-Levrault.

— Peste ! le bonhomme ne fait pas un pas sans sa petite bonne, s’écria Crémière.

— Pour que la bonne femme Portenduère lui ait donné le bras, il doit se passer des choses bien intimes entre eux, dit Massin.

— Et vous n’avez pas deviné que votre oncle a vendu ses rentes et débloqué le petit Portenduère ! s’écria Goupil. Il avait refusé mon patron, mais il n’a pas refusé sa patronne… Ah ! vous êtes cuits. Le vicomte proposera de faire un contrat au lieu d’une obligation, et le docteur fera reconnaître à son bijou de filleule par le mari tout ce qu’il sera nécessaire de donner pour conclure une pareille alliance.

— Ce ne serait pas une maladresse que de marier Ursule avec monsieur Savinien, dit le boucher. La vieille dame donne à dîner aujourd’hui à monsieur Minoret, Tiennette est venue dès cinq heures me retenir un filet de bœuf.

— Eh ! bien, Dionis, il se fait de belle besogne ?… dit Massin en courant au-devant du notaire qui venait sur la place.

— Eh ! bien, quoi ? tout va bien, répliqua le notaire. Votre oncle a vendu ses rentes, et madame de Portenduère m’a prié de passer chez elle pour signer une obligation de cent mille francs hypothéqués sur ses biens et prêtés par votre oncle.

— Oui ; mais si les jeunes gens allaient se marier ?

— C’est comme si vous me disiez que Goupil est mon successeur, répondit le notaire.

— Les deux choses ne sont pas impossibles, dit Goupil.

En revenant de la messe, la vieille dame fit dire par Tiennette à son fils de passer chez elle.

Cette petite maison avait trois chambres au premier étage. Celle de madame de Portenduère et celle de feu son mari se trouvaient du même côté, séparées par un grand cabinet de toilette qu’éclairait un jour de souffrance, et réunies par une petite antichambre qui donnait sur l’escalier. La fenêtre de l’autre chambre, habitée de