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SUR LE MOYNE AMADOR.

Comptez que il feut suyvy des yeulx par Madame, qui le proclamoyt bon chevaulcheur. Perrotte disoyt que pour ung moyne il se tenoyt plus roide à cheval que aulcun des gens d’armes, Madamoiselle de Candé sospiroyt. La petite le vouloyt pour confesseur.

— Il ha sanctifié le chastel, feirent-elles toutes quand elles feurent en la salle.

Alors que la chevaulchiée d’Amador vint à l’entrée de l’abbaye, ce feut espantement horrible, veu que le guardian crut que le sire de Candé, mis en appétit de moyne par le trespas du paouvre Amador, vouloyt saccaiger l’abbaye de Turpenay. Ains Amador cria de sa bonne grosse voix, feut recogneu, feut introduict dedans la court, et, quand il descendit de dessus la hacquenée de Madame, ce feut ung esclat à rendre les moynes effarez comme lunes rousses. Aussy gectèrent-ils ung beau cry dedans le refectouere, et vindrent tous congratuler Amador, qui brandilloyt la chartre. Les gens d’armes feurent resgallez du meilleur vin de la cave, qui estoyt ung présent faict à ceulx de Turpenay par ceulx de Marmoustiers, auxquels appartiennent les clouseries de Vouvray. Le bon abbé, s’estant faict lire l’escript du sire de Candé, s’en alloyt disant :

— En ces diverses conionctures esclatte le doigt de Dieu, auquel besoing est de rendre graaces.

Comme le bon abbé revenoyt tousiours à ce doigt de Dieu en