Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 1, 1855.djvu/140

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La bouche, démeublée, et où se voyaient quelques dents noires, était menaçante ; il y venait une salive écumeuse et rare qui ne dépassait point des lèvres pâlies et minces. Cérizet, petit homme, moins sec que desséché, tâchait de remédier aux malheurs de sa physionomie par le costume, et s’il n’était pas opulent, il le maintenait dans un état de propreté qui faisait ressortir sa misère. Tout semblait douteux chez lui, tout ressemblait à son âge, à son nez, à son regard. S’il avait aussi bien trente-huit que soixante ans, il était impossible de savoir si son pantalon bleu, déteint, mais étroitement ajusté, serait bientôt à la mode, ou s’il appartenait à celle de l’année 1835. Des bottes avachies, soigneusement cirées, remontées pour là troisième fois, fines autrefois, avaient peut-être foulé des tapis ministériels. La redingotte à brandebourgs lavée par des averses, et dont les olives avaient l’indiscrétion de laisser voir leurs moules, témoignait par sa forme d’une élégance disparue. Le col-cravatte en satin cachait assez heureusement le linge, mais par derrière on le voyait déchiré par l’ardillon de la boucle, et le satin était resatiné