Page:Balzac Histoire des oeuvres 1879.djvu/222

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— Il me monte des feux à la figure…

— Ah ! ah !

— Je n’ai courage à rien… Ah ! ah ! j’oubliais !… Les yeux me cuisent, et je ressens des tressaillements dans les nerfs de la paupière de celui-là…

Elle montre son œil gauche.

— Nous appelons cela un trismus.

— Ah ! cela se nomme trismus ! Est-ce dangereux ?

— Nullement.

— Je tousse. Une petite toux sèche… J’ai des inquiétudes dans les jambes… Je suis sûre d’avoir un anévrisme au cœur…

— Comment vous couchez-vous ?

— En rond…

— Bien. Sur quel côté ?

— Oh ! toujours à gauche…

— Bien… Bon… Combien avez-vous de matelas dans votre lit ?…

— Trois.

— Avez-vous un sommier ?

— De crin.

— Bon… Marchez un peu devant moi ?…

Elle marche.

— Ne sentez-vous pas des pesanteurs dans la synovie de vos rotules ?…

— Qu’est-ce que c’est, docteur, que cette synovie ?…

— Ce n’est rien. Tenez, c’est une espèce de liqueur, à l’aide de laquelle se meuvent les cartilages que vous avez au genou, là…

— Non, docteur, je n’y sens rien. Êtes-vous heureux de savoir toutes ces choses-là !… Est-ce que si j’y avais des pesanteurs… ?

— Que mettez-vous sur votre tête pendant la nuit ?

— Un bonnet.

— Est-il en toile ou en coton ?…

— En batiste… Mais je mets quelquefois par-dessus un foulard…

— Donnez-moi votre main…

Il tire sa montre.

— Ah ! docteur, je n’aime pas que vous comptiez les minutes… ça me fait peur… Ah ! vous ai-je dit que j’avais des vertiges ?…

— Non.

— Eh bien, j’ai manqué de tomber hier à la renverse…

— Était-ce le matin ?…

— Non, c’était le soir…

— Mais était-ce bien le soir ?…

— Oui, c’était le soir.

— Bon…

— Eh bien, que dites-vous ?

— Hé ! hé ! (Silence.) Savez-vous que M. le duc de G… est allé à Holy-Rood ?…

— Non… Ah bah !… Est-bien vrai ?