Page:Balzac Le Père Goriot 1910.djvu/211

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— Mais je ne vois pas alors à quoi je suis bonne pour une semblable vérification, une supposition que je consentirais à la faire pour deux mille francs.

— Rien de plus facile, dit l’inconnu. Je vous remettrai un flacon contenant une dose de liqueur préparée pour donner un coup de sang qui n’a pas le moindre danger et simule une apoplexie. Cette drogue peut se mêler également au vin et au café. Sur-le-champ vous transportez votre homme sur un lit, et vous le déshabillez afin de savoir s’il ne meurt pas. Au moment où vous serez seule, vous lui donnerez une claque sur l’épaule, paf ! et vous verrez reparaître les lettres.

— Mais c’est rien du tout, ça, dit Poiret.

— Eh bien ! consentez-vous ? dit Gondureau à la vieille fille.

— Mais, mon cher monsieur, dit mademoiselle Michonneau, au cas où il n’y aurait point de lettres, aurais-je les deux mille francs ?

— Non.

— Quelle sera donc l’indemnité ?

— Cinq cents francs.

— Faire une chose pareille pour si peu. Le mal est le même dans la conscience, et j’ai ma conscience à calmer, monsieur.

— Je vous affirme, dit Poiret, que mademoiselle a beaucoup de conscience, outre que c’est une très-aimable personne et bien entendue.

— Eh bien, reprit mademoiselle Michonneau, donnez-moi trois mille francs si c’est Trompe-la-Mort, et rien si c’est un bourgeois.