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Page:Balzac Le Père Goriot 1910.djvu/68

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espèce de charge qu’un jeune peintre, habitué de la pension Vauquer, y avait inoculée.

— Eh bien, monsieurre Poiret, dit l’employé au Muséum, comment va cette petite santérama ?

Puis sans attendre sa réponse :

— Mesdames, vous avez du chagrin, dit-il à madame Couture et à Victorine.

— Allons-nous dinaire ? s’écria Horace Bianchon, un étudiant en médecine, ami de Rastignac ; ma petite estomac est descendu usque ad talones.

— Il fait un fameux froitorama ! dit Vautrin. Dérangez vous donc, père Goriot ! Que diable ! votre pied prend toute la gueule du poêle.

— Illustre monsieur Vautrin, dit Bianchon, pourquoi dites-vous froitorama ? Il y a une faute, c’est froidorama.

— Non, dit l’employé du Muséum, c’est froitorama, par la règle : « J’ai froit aux pieds. »

— Ah ! ah !

— Voici Son Excellence le marquis de Rastignac, docteur en droit-travers, s’écria Bianchon en saisissant Eugène par le cou et le serrant de manière à l’étouffer. Ohé ! les autres, ohé !

Mademoiselle Michonneau entra doucement, salua les convives sans rien dire, et s’alla placer près des trois femmes.

— Elle me fait toujours grelotter, cette vieille chauve-souris, dit à voix basse Bianchon à Vautrin en montrant mademoiselle Michonneau. Moi qui étudie le système de Gall, je lui trouve les bosses de Judas.

— Monsieur l’a connu ? dit Vautrin.