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le sang de la coupe

Pour attirer à soi des regards plus propices,
Faire couler à flots le sang des sacrifices ?
Hèra ! viens ! pour guérir notre cœur ulcéré,
Dépouillons la splendeur de notre front sacré.
Cherchons l’ombre et le bruit, les promptes funérailles,
Les champs tièdes encor de récentes batailles,
Où, privés pour jamais du calme des tombeaux,
Les héros mutilés râlent, où les corbeaux,
Sombres comme l’Érèbe ou comme nos pensées,
Planent sinistrement en légions pressées !

Les Déesses, précédées par Hermès, s’envolent sur leurs chars.

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Le Chœur.

C’est moi, fils de Priam, qui parmi ces grands bois
Ai doucement, aux sons cadencés de ma voix,
Guidé tes premiers pas sur l’herbe, et quand naguères
Tu parus dans les jeux, né pour les grandes guerres,
Tu vainquis même Hector, qui de tous tes rivaux
Était le plus habile à dompter les chevaux.
Maintenant, pour juger les Déesses en larmes
Choisi par le roi Zeus, ô berger, tu les charmes !
Tel fut ce bel enfant que je ne verrai plus,
Ganymède, enlevé sur ces monts chevelus,
Ou tel dans Naxos vint, sur la mouvante lame,
Lysios florissant, au visage de femme.