Page:Banville - Camées parisiens, s3, 1873.djvu/67

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 60 —

créée pour cette circonstance spéciale. Musicienne dont l’oreille n’affecte aucune petitesse, Suzanne avait inventé, dans une farce récente, un bien délicat et amusant rappel de couleur, fait pour réjouir les vrais amants de la palette : une perruque rose d’une fraîcheur de ton énivrante, et parfaitement raccordée au ton de sa robe rose. Le corps de Suzanne (quand je pense que nous l’avons vue mince à tenir dans un bracelet !) est, je crois, une puissante ironie de la nature. Par là, sans doute, cette grande Nourrice raille cruellement l’abominable maigreur de notre esprit moderne, et rappelle à notre souvenir la bonne reine Gargamelle, qui d’une seule fois mangea tant de tripaille, à savoir seize muids, deux bussards et six tupins. Ô la folle comédienne ! sur son visage éclate une joie immense, surnaturelle ; pour plaire aux hommes, elle a tout, et, par un autre caprice de la destinée, elle a, pour désarmer aussi les femmes, un nez… qui est le nez même de Bressant !