Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/180

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dérobés dans un musée. Il est facile de voir qu’elle ne porte aucune espèce de corset, et il s’en faut bien peu que ses seins purs, turbulents, hardis, révoltés comme des Spartacus, ne percent la robe.

— « Oui, dit-elle, en regardant fixement le vide, j’ai voulu vous connaître, parce que c’est si flatteur de causer avec un homme d’esprit ! Nous chanterons des romances, et vous me direz des calembours. Moi, j’en sais aussi. Savez-vous quelle est la sainte qui n’a pas besoin de jarretières ? »

Devant cette grue surnaturelle, le maître reste silencieux. Mais Pierril, qui le devine et le connaît sur le bout du doigt, l’entend dire mentalement à l’idiote michelangesque : — « Va, continue, donne-t-en à plaisir, sois bête comme une troupe d’oies. Mais tout à l’heure, quand le petit jeune homme sera parti, j’aurai mon tour, je prendrai ma revanche au point de t’en donner l’onglée, et je te serrerai si longtemps et si fort entre mes bras — que tu ne diras plus rien du tout ! »


CVII. — AMICUS PLATO

À demi couchée sur les blancs coussins de soie à fleurs d’or piqués de points d’un vert tendre, Célestine Oddo ressemble bien plus à une déesse qu’à une femme ; car malgré ses belles chairs, sa pâleur lui donne l’air imma-