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Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/47

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sans le vouloir, le vieux paysan chenu à tête blanche, qui en ce moment la croise sur le chemin, compare la splendeur de ses lèvres à ce flot de coquelicots rouges, qui coupe et traverse magnifiquement les épis de ses fleurs de sang.


XVII. — L’AUTOMNE

Madame Jacqueline de Riberpré a mieux que la jeunesse : elle a la beauté épanouie et superbe des reines qui, dans les festins, tiennent d’une main blanche et grasse leur coupe d’or emplie d’un généreux vin. Elle n’est pas seulement désirée de tous ; elle est ardemment, uniquement adorée d’un seul, et toutes les femmes lui envient avec raison l’amour du comte Ogier de Sagrède. C’est lui, ce vaillant, ce gentilhomme de race royale, qui l’accompagne dans le verger débordant de fruits où, tyrannisés par un habile artiste, les espaliers couverts de poires, de pommes, de pêches rougissantes, affectent des figures d’éventails, d’urnes et de lyres, et ploient leur fierté au tout-puissant caprice de l’homme. Madame de Riberpré porte la légère corbeille dans laquelle elle mettra les pêches qu’elle va cueillir, et qu’elle veut choisir dignes d’être appréciées par le plus gourmand des évêques.

Silencieux à côté d’elle, le comte Ogier l’admire, et qui ne l’admirerait ? Sous la robe décolletée en damas