Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/62

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Elle pose sa terrine sur la table et sort, après en avoir enlevé le couvercle ; et en respirant le délicat fumet qui s’en échappe, l’évêque reste songeur. Cependant, il s’est assis, il a fait asseoir son hôte ; Maguelonne revient, apportant l’omelette fumante, dont les portions sont bientôt servies sur les assiettes chaudes.

— « Par les reliques de saint Polycarpe ! s’écrie, après les premières bouchées, monseigneur Hilaire, qui n’a jamais rien mangé de si exquis et délicieux, qu’est-ce que cette omelette-là ?

— Hélas ! dit Maguelonne honteuse, c’est tout bonnement une omelette aux queues d’écrevisses et aux laitances de carpes, sur laquelle j’ai versé un simple jus de perdrix et de cailles.

— Nous nous en contenterons donc ! » dit le bon évêque, admirant en lui-même la servante ingénue, et à demi-voix il ajoute : Sancta simplicitas ! répétant ainsi le mot prononcé par le martyr qui, monté sur le bûcher, vit une vieille à l’âme enfantine apporter péniblement son pauvre fagot, pour aviver la flamme.


XXVII. — L’ODORAT

La grande et svelte Jeanne vient de partir. Assis dans un large fauteuil, le poète songe, immobile. Bientôt, son rêve l’emmène sur la vaste mer ; il voit les cor-