Page:Banville - La Lanterne magique, 1883.djvu/93

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sous la lumière crue d’un bec de gaz, elles voient venir à elles monsieur Alexandre.

Il est sérieux et vêtu, non suivant le lieu commun légendaire, mais selon la mode la plus récente usitée dans le monde auquel il appartient. Il n’est pas coiffé d’une casquette à pont. Son pantalon à pieds d’éléphant, ses souliers pointus, son col droit, sa cravate claire, son petit chapeau, ses cheveux qui forment une dent sur son front, inspirent le respect ; et ses gants chamois à coutures bleues rangés dans son veston font la meilleure figure du monde. Silencieusement, il dénoue les bras des deux jeunes filles ; puis, sans s’occuper de Céphise rougissante et stupéfaite, sans se départir du calme inséparable de la vraie force, il dit à la petite Julie, qui tremble comme la feuille :

— « Eh bien ! et travailler ? »


XLVII. — ROIS EN EXIL

En se promenant au Luxembourg, près du bassin, le poète Jean Sézary regarde le Cygne voguant lentement sur l’eau calme, et remarque sans peine qu’il a l’air fort triste. Bientôt, quoique nul bruit ne frappe réellement l’air, le poète écoute en lui une voix qui lui parle, et il ne doute nullement que cette mélodieuse voix soit celle du Cygne.

— « Eh bien ! non, mon frère, dit le grand Oiseau de