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NOUS TOUS.


Quoi ! tes histrions et tes grues
Sous leurs semelles incongrues
Fouleraient la neige au flanc pur,
La neige, divine pucelle,
Dont l’âpre candeur étincelle
Sous les caresses de l’azur !

Non. La neige avec orgueil touche
Les champs nus où l’été farouche
Faisait ruisseler des épis
Qui sont la joie et la richesse.
Mais toi, courtisane et duchesse,
Marche sur les riches tapis.

La neige est faite pour les cimes
Où nous, les Dieux, nous nous assîmes ;
Pour les monts, où la Vérité
N’entend pas de sourdes huées,
Et voit déchirer les nuées
Par le vol de l’aigle irrité.