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Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/218

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Le Refrain ne compte pas dans le nombre des vers, et en effet il n’est pas un vers. Il est plus et moins qu’un vers, car il joue dans l’ensemble du Rondeau le rôle capital.

Il en est à la fois le sujet, la raison d’être et le moyen d’expression. Car ce n’est que pour répéter trois fois ce mot persuasif ou cruel, ce n’est que pour lancer au même but l’une après l’autre ces trois pointes d’acier qu’on les ajuste au bout des strophes, qui sont à la fois le bois léger et les plumes aériennes du trio de flèches que représente le Rondeau.

Mais qui fait de ces trois flèches un tout, un trio ? C’est que tour à tour elles viennent frapper à la même place et s’enfoncer dans la même blessure.

Pour faire venir et bien venir le Refrain, pour qu’il apparaisse trois fois avec un aspect différent et dans une lumière nouvelle, tous les moyens sont légitimes (pourvu que l’effort soit ingénieusement dissimulé, car toute difficulté vaincue devient pour le poëte le contraire d’un mérite, pour si peu qu’on sente ou qu’on aperçoive la trace de l’outil !) et on a le droit de se permettre même… le calembour ! partout ailleurs justement exécré. J’aurais pu trouver trois rondeaux de Voiture plus variés de ton et de rhythme que ceux que j’ai cités : mais j’ai choisi ceux-là parce