Le serpentin devait ramener à la fin le premier vers,
mais inversé, de façon, dit Colletet, « qu’à l’imitation du
serpent, il semble retourner en luy-même. » Enfin on
composa des Sonnets licencieux ou libertins, où l’auteur
feignait de violer les règles par emportement poétique ou
par entraînement de passion. Baïf, Ronsard, Maynard et
Malherbe en ont composé de semblables : on en cite même
de Du Bellay, « dont tous les Vers courent à toute bride
comme des chenaux eschappez, et n’ont aucune alliance
de rime l’vn auec l’autre. Témoin celuy-cy :
Arrière, arrière, ô meschant populaire,
Ô que ie hais ce faux peuple ignorant !
Doctes Esprits, fauorisez les Vers
Que veut chanter l’humble Prestre des Muses[1]. »
Le phénix, le merle blanc de la poésie difficile et compliquée est sans contredit le Sonnet suivant, indiqué par
Colletet dans la vie de Jean de Schelandre[2], et qui est à
la fois acrostiche, mésostiche, losange et croix de Saint-André.
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A Diuge à ma Cypris Non pOint la pomme d’Or Ne rien d’iN a Ni mé En vn au Tel si beau, Donn’ ô brAue pAssant Et rieN de trop commuN MeTs y pour l’adorer Ou sVr tout n’y a pOint Nul vien N’a semblaNt faux Tel sous vn fEinT discours A bord’ A ces beAutés, Vous qVi feignez l’aMour Tout hypocrit’ est traitstr’ |
D’Amour la mèr’ et d’Âme Ou vN pareil honNeur Ni prese Nt de seNteur Tout don vil Est infâme. Autre Don tout De flame Ni dE l’ex te ri Eur, TeMps trauail cœur et âMe Vn plVs cher que le cOeur : Nostre baNd’est saNs art, Et recouu ErT de fard A ceux lA l’on Adiouste, MesVrez vous au Mien, ET périra sans doutE, |
destournez tout amant qvi ne veut aymer bien
à ne feindre d’aymer mon cœur montre la rovte.