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Page:Banville - Petit Traité de poésie française, 1881.djvu/89

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Cette trace qui nous enseigne,
Ce pied blanc, ce pied fait de jour,
Ce pied rose, hélas ! car il saigne,
Ce pied nu, c’est le tien, amour !


Les Contemplations, Livre IV, I.


Mais ceci c’est tendre l’arc d’Ulysse, et Ulysse seul le peut ! « Le subtil Odysseus, ayant examiné le grand arc, le tendit aussi aisément qu’un homme habile à jouer de la kithare et à chanter tend, à l’aide d’une cheville, une nouvelle corde faite de l’intestin tordu d’une brebis [1]. » Nous au- tres, nous ne ferions que nous y couper les doigts ! Quant aux mauvaises rimes, je n’en fournirai pas d’exemples ; on ne les rencontre que trop aisément, et j’estime qu’on grandit les hommes et les artistes en leur montrant, non ce qu’il ne faut pas faire, mais ce qu’il faut faire. — Évitez encore de faire rimer les mots en is, en us, en as et en os, dont l’s final se prononce avec ceux dont l’s final ne se prononcé pas. Assurément ces rimes défectueuses abondent chez les mauvais poètes, mais mon maître me permettra de les prendre chez lui, car j’ai horreur de citer les mauvais poètes, même pour le bon motif. Ainsi Victor Hugo a eu tort de faire rimer prix avec Lycoris, assis avec Chrysis,

  1. Homère, Odyssée, Rhapsôdie XXI, traduction de Leconte de Lisle.