Page:Barbara - L’Assassinat du Pont-Rouge, 1859.djvu/24

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ses victimes. Elles furent les dernières à connaître ses désordres, et, hormis un luxe ruineux, elles crurent jusqu’à la fin n’avoir point de reproche à lui faire. Cependant, bien qu’il se montrât vis-à-vis d’elles toujours aussi empressé, toujours aussi jaloux de leur plaire, sa pensée s’éloignait de plus en plus de sa femme et de son intérieur. Entraîné par gloriole au milieu de ces rentiers parasites autour de qui rôdent des industriels de toutes sortes, comme font les requins autour d’un navire, il achetait le triste honneur de cette compagnie par un mépris de l’argent analogue à celui d’un homme qui n’est pas le fils de ses œuvres ou qui l’est devenu trop vite. En proie au jeu, à d’insatiables courtisanes, à une dissipation effrénée, bientôt à l’usure, quand, après quatre années de ces excès, l’embarras de ses affaires exigeait des mesures urgentes, énergiques, radicales, il achevait de compromettre irréparablement sa position en se jetant pieds et poings liés dans des spéculations hasardeuses. Enfin, aux défiances dont il était l’objet, à son crédit ébranlé, il n’était plus possible de prévoir comment, à moins d’un miracle, il parviendrait à conjurer sa ruine.

« Je vous laisse à penser dans quelles anxiétés je vivais, continua Frédéric qui, en cet endroit, plongea de nouveau les doigts dans sa tabatière. Notez que je me consolais un peu en songeant que madame Ducornet et sa fille, quoi qu’il arrivât, auraient