Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/269

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Paris tous les hivers pour quelques jours. Je la rencontrais chez la princesse de Cou… ourt… tenay, dont elle était un peu parente. C’était de l’esprit servi dans sa glace, une femme froide à vous faire tousser.

« Excepté ces quelques jours passés par hiver à Paris, — reprit l’audacieux conteur, qui ne mettait même pas à ses personnages le demi-masque d’Arlequin, — la vie de la comtesse du Tremblay de Stasseville était réglée comme le papier de cette ennuyeuse musique qu’on appelle l’existence d’une femme comme il faut, en province. Elle était, six mois de l’année, au fond de son hôtel, dans la ville que je vous ai décrite au moral, et elle troquait, pendant les autres six mois, ce fond d’hôtel pour un fond de château, dans une belle terre qu’elle avait à quatre lieues de là. Tous les deux ans, elle conduisait à Paris sa fille, — qu’elle laissait à une vieille tante, Mlle de Triflevas, quand elle y allait seule, — au commencement de l’hiver ; mais jamais de Spa, de Plombières, de Pyrénées ! On ne la voyait point aux eaux. Était-ce de peur des médisants ? En province, quand une femme seule, dans la position de Mme de Stasseville, va prendre les eaux si loin, que ne croit-on pas ?… que ne soupçonne-t-on pas ? L’envie de ceux qui restent se venge, à sa façon, du plaisir de ceux qui voyagent. De