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Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/285

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avec poésie la mort qui passe. Était-ce alors la vérité qui passait ?…

« Oui, — répondit le narrateur, — c’est affreux ; mais est-ce vrai ? Les natures au cœur sur la main ne se font pas l’idée des jouissances solitaires de l’hypocrisie, de ceux qui vivent et peuvent respirer la tête lacée dans un masque. Mais, quand on y pense, ne comprend-on pas que leurs sensations aient réellement la profondeur enflammée de l’enfer ? Or, l’enfer, c’est le ciel en creux. Le mot diabolique ou divin, appliqué à l’intensité des jouissances, exprime la même chose, c’est-à-dire des sensations qui vont jusqu’au surnaturel. Mme de Stasseville était-elle de cette race d’âmes ?… Je ne l’accuse ni ne la justifie. Je raconte comme je peux son histoire, que personne n’a bien sue, et je cherche à l’éclairer par une étude à la Cuvier sur sa personne. Voilà tout.

« Du reste, cette analyse que je fais maintenant de la comtesse du Tremblay, sur le souvenir de son image, empreinte dans ma mémoire comme un cachet d’onyx fouillé par un burin profond sur de la cire, je ne la faisais point alors. Si j’ai compris cette femme, ce n’a été que bien plus tard… La toute-puissante volonté, qu’à la réflexion j’ai reconnue en elle, depuis que l’expérience m’a appris à quel point le corps est la moulure de l’âme, n’avait pas