Page:Barbey d'Aurevilly-Les diaboliques (Les six premières)-ed Lemerre-1883.djvu/475

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jour, il supprima toutes les questions et inquisitions sur sa personne en bouclant sa malle en deux temps, comme un officier, et en disparaissant comme par un trou.

Où alla-t-il ? Qui s’en occupa ? Il resta plus d’un an parti, puis il revint à Paris, reprendre le brancard de sa vie de mondain. Il était un soir chez l’ambassadeur d’Espagne, où, ce soir-là, par parenthèse, le monde le plus étincelant de Paris fourmillait… Il était tard. On allait souper. La cohue du buffet vidait les salons. Quelques hommes, dans le salon de jeu, s’attardaient à un whist obstiné. Tout à coup le partner de Tressignies, qui tournait les pages d’un petit portefeuille d’écaille sur lequel il écrivait les paris qu’on faisait à chaque rob, y vit quelque chose qui lui fit faire le « Ah ! » qu’on fait quand on retrouve ce qu’on oubliait…

« Monsieur l’ambassadeur d’Espagne, — dit-il au maître de la maison, qui, les mains derrière son dos, regardait jouer, — y a-t-il encore des Sierra-Leone à Madrid ?

— Certes, s’il y en a ! — fit l’ambassadeur. — D’abord, il y a le duc, qui est de pair avec tout ce qu’il y a de plus élevé parmi les Grandesses.

— Qu’est donc cette duchesse de Sierra-Leone qui vient de mourir à Paris, et qu’est-elle au duc ? — reprit alors l’interlocuteur.