Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/12

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pas venu. Mais cette dignité m’ennuie, à la fin, et d’ailleurs, à nos âges, les avances ne compromettent plus. Rengorgez-vous donc, car en voici une très positive que je vous fais. Pourquoi ne m’écrivez-vous pas ? Me croyez-vous donc si occupée à contempler les huit béatitudes de la lune de miel de notre chère Hermangarde, que je n’aie plus d’attention et d’intérêt à vous donner ? La marquise de Flers vous a fait ainsi qu’à moi la politesse de vous inviter à sa campagne. Vous avez refusé, Dieu sait pourquoi ! mais du moins vous m’aviez promis de m’écrire, et cependant depuis que je suis ici je n’ai reçu nulle nouvelle de vous. Autrefois (ce mot que nous disons si souvent maintenant !), autrefois, vous étiez plus exact et plus empressé, vicomte. Il me semble que sans beaucoup fureter, je pourrais trouver dans un coin de mon petit secrétaire de Sainte-Lucie deux paquets noués d’une faveur rose, dont toutes les lettres mirent moins de temps à m’arriver qu’une seule que j’attends encore aujourd’hui. Je sais bien que nous n’avons pas tout à fait les mêmes choses à nous dire qu’alors. Le temps, en passant sur nous deux, a pris soin de vous ménager des excuses et de justifier votre paresse. S’il n’a pas mis l’oubli dans votre cœur, il a étendu la goutte sur vos doigts. Seulement, monsieur, a-t-il respecté